•     Connaissez-vous cet air de Bach pour soprano et orgue qui était assez en vogue au début du XXe siècle et que l'on nommait communément "l'air de la Pentecôte" ? Je le trouve ici dans une transcription pour harpe datant de 1895,  dans une superbe transcription pour orgue seul datant à peu près de la même époque, et encore ici dans une transcription pour violon... !

          La première fois que je l'ai entendu, c'était à l'occasion des obsèques d'un grand oncle musicien, et j'avais été autant impressionnée par la beauté et la gaieté du chant que par ses paroles pleines de joie, car à l'époque cela se chantait en français.

         Voici les paroles françaises, que l'on ne trouve plus sur youtube que dans l'interprétation désuète de Germaine Lubin accompagnée au piano (ici) :

    Mon âme croyante,
    Tressaille et chante !
    Ton Jésus, le Roi des Rois,
    Jésus est près de toi.

    Fuyez, vaines plaintes,
    Douleurs, angoisses, craintes,
    Je chante ma joie :
    Jésus est près de moi !

     
           En fait, s'il est désigné sous le nom d'air de la Pentecôte, c'est qu'il est détaché d'une cantate écrite lors du temps de la Pentecôte, la cantate BWV 68, qui commence tout de même par un choral exprimant ces paroles merveilleuses :

    Dieu a tant aimé le monde
    Qu'Il lui a donné son Fils.
    Et qui se donne à Lui par la Foi
    Vivra auprès de Lui pour l'éternité !

    Qui croit que Jésus est né pour lui
    Ne sera jamais perdu,
    Et il n'est aucune souffrance qui puisse affliger
    Celui qui aime Dieu et son Jésus.

     

          C'est juste après ce choral qu'éclate ce chant de joie, que l'on trouve maintenant abondamment sur le net dans la version d'origine et en allemand. En voici une interprétation qui me plaît et dont le visuel n'est pas la photographie de la cantatrice ; je vous en donne ci-dessous la traduction exacte.

     

     

    Mon coeur rempli de foi,
    Exulte, chante, batifole !
    Ton Jésus est là.

    Loin de moi, plaintes et larmes !
    Je ne puis vous dire qu'une chose :
    Mon Jésus est tout près...

       Ce qui est particulièrement touchant dans ces textes et qui fait frémir l'âme, c'est l'attention qui est portée à l'existence d'un maître vivant. Non pas d'un vieux barbon issu des hiérarchies ecclésiastiques ; mais pas non plus d'un hypothétique prophète apparu il y a des millénaires. Non ! Jésus, le seul témoin du Père descendu jusqu'à nous, est là, maintenant, ici, tout près.

        Et on le sent aussi attachant, aussi attirant que s'Il était présent, jeune et plein d'amour comme au Sermon sur la Montagne !

         Franchement, croyez-vous qu'une âme puisse se donner à Dieu uniquement à travers des textes lointains et des dogmes surannés ? Et Jésus lui-même n'a-t-il pas dit qu'il reviendrait - tandis qu'en Orient on sait pertinemment que le Seigneur Krishna (qui est sa parfaite réplique...) revient régulièrement sous diverses formes pour aider les humains à réaliser leur véritable nature qui est divine ?

       Alors, il ne reste plus qu'à Le chercher. 
       Pour ceux que cela intéresse évidemment.
       Pour ceux que l'amour dévore, et dont le seul but est de comprendre pourquoi !

     

     


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         Dans la Grèce antique, à côté des religions officielles qui n'étaient en fait que  soumission à l'ordre public, existaient des religions dites "à mystères" qui étaient basées sur l'initiation (et entourées donc du plus grand secret, d'où leur nom) et attiraient un immense public.

            On distinguait les Mystères d'Éleusis définis par le culte de Déméter, déesse des moissons descendue aux Enfers rechercher sa fille Perséphone enlevée par Hadès et revenue dans la ville d'Éleusis sous l'aspect d'une mendiante, et les Mystères Orphiques, plus complexes mais présentant la même traversée des Enfers par le héros Orphée, descendu chercher sa bien-aimée Eurydice, également la proie du Dieu des morts.

     

    Orphée et son mystère
    Orphée ramenant Eurydice des enfers - J-B Corot

     

          Cependant le mythe d'Orphée, outre qu'il nous parle davantage à cause de l'aspect "Prophète" du personnage, poète d'exception capable de parler aux animaux et d'émouvoir les pierres, se double également d'une relation avec le Dionysos Zagreus d'origine moyen-orientale, démembré par les Titans à la manière de l'Osiris égyptien... et par là offrant une similarité avec Jésus mis en croix.

          Comment ne pas comprendre que par sa Foi en son âme divine (représentée par Eurydice qu'il aime), Orphée est conduit à traverser le monde des ombres et de la souffrance et à comprendre que c'est celui dans lequel nous vivons tous et qui est erroné ; jusqu'à accepter sa destruction complète en tant qu'être de chair, pour renaître au monde véritable qui est sa nature divine ? Voici ce qu'on peut lire dans Wikipedia :

    L'orphisme professait donc que l'homme est d'origine divine (il naît du reliquat d'une race immortelle qui a ingéré du dieu) et d'origine « titane » ; double origine qui correspond, sinon à deux pôles, du moins à deux parts humaines : une part proprement divine, dont il faut se souvenir — c'est le souvenir qui permet d'accéder de nouveau au monde divin —, et une part audacieuse, héritée des Titans, et qui lui permet de braver l'ordre établi. Les mystères de l'orphisme ne furent qu'à moitié élucidés mais nous sommes sûrs d'une chose, c'est qu'ils n'ont pas totalement disparu.

    Wikipedia

         Il est étonnant de plus de constater que l'orphisme apparut en Grèce en même temps que le bouddhisme en Inde ! Et que selon l'analyse proposée plus bas par Wikipedia on lui trouve plutôt une relation avec le Jaïnisme : 

        L'orphisme sugit en Grèce au même moment que le bouddhisme en Inde. À première vue et sans établir de rapport direct entre les deux philosophies, un rapprochement vient à l'esprit concernant la question du salut personnel et de la délivrance.

        Ceci posé, des divergences apparaissent vite. En fait, les études stimulées par les découvertes archéologiques du dernier demi-siècle — notamment le papyrus de Derveni en 1962 et les Lamelles d'or en 1973 — font plutôt ressortir des affinités avec le jaïnisme. Le nombre des points communs est alors troublant : dualisme bien/mal ; âme prisonnière de la matière ; transmigration des âmes ; responsabilité et liberté individuelles ; possibilité de délivrance ; exigence de pureté (d'où : port du vêtement blanc) ; respect de toute forme de vie (d'où : régime végétarien). Ajoutons la conception atomiste de la matière, conception plutôt mieux détaillée par les Jaïna que chez Démocrite.

    Wikipedia

     

       Tout ceci pour vous expliquer ce poème, que j'ai composé en suivant la belle inspiration proposée par Jack Maudelaire autour du Silence...

     

    Orphée par Gustave Moreau
    Orphée par Gustave Moreau

     

        Orphée détruit au monde revit muet.

     

    Enfin sorti du labyrinthe obscur
    Et donné en pâture aux bêtes


    Orphée déchiqueté dérivant sur les eaux
    Connaît le Chant sublime


    La Voix majestueuse émanée du Silence
    Beauté Splendeur suprême

     

     

     


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      Olivier Messiaen est un musicien contemporain qui paraîtra difficile à la plupart d'entre vous, je m'en doute bien. Et pourtant il faut le connaître, car c'est un personnage assez stupéfiant. 



    Olivier Messiaen

     

         Né en 1908 en Avignon en disparu en 1992 à Clichy près de Paris, il a comme Victor Hugo traversé le XXe siècle et laissé une marque impérissable, ne serait-ce que par le nombre d'élèves en composition qu'il a formés (parmi lesquels Pierre Boulez, Karlheinz Stockhausen, Marius Constant...). Cependant le plus important chez lui, est que ce fut un musicien totalement mystique : non content d'être fervent catholique (son nom l'y prédispose d'ailleurs !) il s'est inspiré des rythmes et de la philosophie de l'Inde pour écrire ses plus belles pages, notamment dans la Turangalîla Symphonie (1948).

        Organiste titulaire en l'église de la Trinité à Paris il a composé des merveilles pour l'orgue ; mais pianiste virtuose il a également illustré le piano en véritable Franz Liszt contemporain ; et enfin orchestrateur hors pair (n'a-t-il pas enrichi de façon spectaculaire le pupitre des percussions en important d'Asie toutes sortes de gongs !) il nous a laissé d'immenses chefs d'oeuvre avec voix et chœurs. Ajoutez à cela sa passion pour les oiseaux dont il a transcrit tous les chants en notation musicale et vous avez un portrait approché de ses principales caractéristiques...

     

    Messiaen-stèle
    Tombe d'Olivier Messiaen au cimetière de Saint-Théoffrey près de Grenoble

     

        Écouter Olivier Messiaen, quand on en pénètre le langage, c'est entrer dans un univers solennel et contemplatif, nourri de textes bibliques allant du Cantique des Cantiques à l'Apocalypse de Saint-Jean, en passant par les Psaumes ou les épîtres de Paul. Si le texte n'est pas lui-même chanté en latin, dans l'esprit du plain-chant grégorien, il est indiqué en exergue et comme commentaire du passage symphonique considéré (par exemple dans Des Canyons aux étoiles). Tout est donc prétexte à méditation... Et c'est là que je voulais en venir aujourd'hui.

         J'ai repris cette grande oeuvre austère qui s'intitule La Transfiguration de Notre Seigneur Jésus-Christ.

           Construite sous la forme de deux septénaires, c'est-à-dire de deux séries de sept parties dont chacune se termine par un majestueux choral, elle présente dans son premier volet, outre le récit de la Transfiguration selon Saint Matthieu, des extraits très émouvants de Psaumes, du livre de la Sagesse et d'épîtres de Paul ; et dans le second, qui me touche moins parce que plus discoureur, des citations de Saint-Thomas d'Aquin et de la liturgie du jour.

         Pour ceux d'entre vous qui l'ignoreraient, il s'agit donc d'un jour où Jésus, entraînant avec lui ses trois disciples préférés (Pierre, Jacques et Jean qui était son frère), gravit une montagne élevée afin de leur y apparaître en secret sous une forme transfigurée, éclatante, et devisant avec Moïse et Élie dans une nuée lumineuse (Évangile selon Saint Matthieu, chapitre 17).

         Quatre fois au cours de l'oeuvre est repris ce passage du Livre de la Sagesse (chapitre 7, verset 26) :

    « C'est la blancheur de la Lumière éternelle, Son miroir sans tache, et l'image de Sa bonté. »

       Ailleurs, un extrait de l'épître aux Hébreux de Saint Paul (chapitre 1, verset 3) apporte une image impressionnante de la vision offerte aux apôtres :

    « Christ Jésus, Splendeur du Père, effigie de Sa substance. »

         Plus loin un passage très doux emporte mes suffrages, il s'inspire du Psaume 84 (début) :

    « Que tes demeures sont délicieuses ! 
    Mon âme languit après les parvis du Seigneur...
    Mon cœur et ma chair ont tressailli de joie pour le Dieu vivant.
    - Tes autels, mon Roi et mon Dieu... ! »

        Vers la fin, la Gloire du Tout-Puissant et la frayeur des apôtres est évoquée par cette formule, tirée de la Genèse (chapitre 28, verset 17) : 

    « Terrible est cet endroit : c'est la maison de Dieu, la Porte du Ciel. »

        Cependant malgré la beauté des textes, je me contenterai finalement de vous présenter le premier choral, intitulé Choral de la Sainte Montagne et qui s'inspire du Psaume 48 (verset 2). En effet, Messiaen cède constamment dans cette oeuvre à une emphase ponctuée de piaillements d'oiseaux qui peut agacer celui qui n'est pas totalement immergé dans un état contemplatif (et je dirais même : d'adoration !), et c'est le passage le plus stable et le plus harmonieux de l'ensemble.

         En voici la teneur (le texte est en latin) :

    Magnus Dominus, et laudabilis nimis ;
    In civitate Dei nostri, in Monte Sancto ejus.

    « Grand est le Seigneur et digne de toute louange,
    Dans la cité de notre Dieu, sur la Montagne Sainte. » 

     

     

          Vous apprécierez la manière qu'a le compositeur de partir d'accords classiques pour "tourner autour" en variant légèrement, en ajoutant des notes et en troublant l'ensemble pour revenir ensuite au clair... C'est à la fois intelligible et nouveau, à la fois déroutant restabilisant. Une des marques de sa personnalité.  

     

     


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         J'ai réalisé un montage photos pour illustrer sous forme vidéo une des plus belles pages d'Olivier Messiaen : Demeurer dans l'Amour, extraite de son œuvre de maturité "Éclairs sur l'Au-delà".

          Je vous le propose donc aujourd'hui. C'est une musique extrêmement émouvante, à condition que l'on prenne le temps de la pénétrer.



     

         Vous pouvez la mettre en plein écran...

            


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             Depuis que ma rencontre avec Jack m'a conduite à écrire sur le Silence, ce poème est le 6e. Merci à lui. 

     

    Transfiguration

     

     

    Là règne le Silence
    et sa Paix souveraine

    À son appel profond
    mystérieux et puissant

    ton âme a défailli
    ivre d’adoration

     

     


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