• Balancement

     

     

     
    Au jeu des balançoires
    Il a perdu son âme…

    Ou n’est-ce pas auparavant,
    Tandis qu’enfouie au fond de lui
    Il la tenait captive,
    Muette et oubliée,
    Qu’il en était privé ?
    Et voici qu’à force de rire
    A gorge déployée
    Sur un morceau de bois agité dans les airs,
    Atterrissant et décollant sans cesse
    En un piqué-levé,
    En une chute-élévation,
    Allant, venant,
    Poussé, chassé,
    Il ne fut plus qu’un ample mouvement,
    Que vitesse envolée,
    Que va-et-vient charmé,
    Qu’emportement ravi…

    Et soudain,
    Son âme s’échappa comme l’eau s’évapore
    Et s’immobilisa à le regarder vivre,
    Ailes déployées,
    Superbe comme un lys
    Dressé dans le soleil couchant…
    Défaillant, à sa corde agrippé,
    Il vit le soir doré
    Superbement s’épandre,
    Et il sentit les arbres exhaler leur odeur,
    Tandis que peu à peu
    Leurs effluves le pénétraient…
    Et le rayonnement secret du soir,
    Comme une nourriture exquise
    Entra dans sa respiration,
    Y demeura comme en suspens,
    S’y déploya…

    En un instant,
    Il se sentit égal au paysage,
    Rire égrené sur fraîcheur répandue,
    Et chute suspendue ;
    Alors son corps fut si sensible
    Qu’il le posa sur le gazon.
     
    « Grand SilenceLe Jeu quotidien »

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