L'hiver approche, la nuit descend... Rêvons au coin du feu au son de musiques chaleureuses. Voici le souvenir d'un concert donné dans un château. Il y avait un violoncelle et un piano (deux dames), et elles jouaient successivement la sonate de Chopin et celle de Rachmaninoff.
(Poème déjà publié en 2005)
1 - Prélude
Sous le scintillement diffus des projecteurs,
Les instruments au loin resplendissent dans l'ombre...
Le piano ténébreux comme un miroir obscur
Ressemble à un félin faiblement assoupi ;
Près de lui est couché l'élégant violoncelle,
La nuque renversée comme un enfant rêveur...
2 - Sonate
Le piano gronde
Au fond d'un gouffre de splendeur,
Tandis que monte, intermittente,
La plainte âpre du violoncelle...
Puis c'est un lac profond à nos regards noyés,
Sur lequel vient glisser en volutes d'espace
Le chant sonore et grave d'un adolescent...
Par questions et réponses, ils luttent un instant,
Puis s'estompent en mourant, comme repris par l'ombre.
Leurs voix s'enlacent encore
Au-dessus de nos têtes,
Flamboyant caducée
Au ciel imaginaire...
3 - Postlude
Le rêve chaud vibre dans l'air,
Comme une chevelure ondulante et soyeuse
Jetant à profusion
Ses flammèches fluides...
La vision arrêtée
Fige les cœurs en suspension,
Le souffle sur les lèvres,
L'âme prête à jaillir...
Mais le torrent subit des applaudissements
Brise soudain l'extase
De cette nuit d'été.
Et pour illustrer, voici un merveilleux enregistrement du troisième mouvement de cette sonate de Rachmaninoff trouvé sur Youtube (les autres y figurent aussi), par le violoncelliste israëlien Amit Peled, accompagné du pianiste espagnol Daniel del Pino (enregistrement de décembre 2004).
J'avoue que je tiens ce mouvement lent pour un des sommets de la musique pour violoncelle, et qu'il m'avait laissé une impression impérissable.