• Présents

     
        Hier soir j'ai ouvert quelques livres de poésie, mais c'est le premier sur lequel est tombé mon regard qui a retenu mon attention et a suffi à enchanter ma nuit.

     


    Pêche

    (Image du net - site)

     

     

    «    Au matin, je jetai mon filet dans la mer.

          J'arrachai du sombre abîme d'étranges merveilles : les unes brillaient comme un sourire, d'autres scintillaient comme des larmes et d'autres étaient rougissantes comme les joues d'une jeune épousée.

         Quand, chargé de mon précieux fardeau, je revins à la maison, ma bien-aimée était assise dans le jardin et nonchalamment effeuillait les pétales d'une fleur.

         J'hésitai un instant, puis je plaçai  à ses pieds tout ce que j'avais arraché à la mer et je restai là silencieux.

           Elle y jeta un regard et dit : Quelles sont ces choses étranges ? À quoi peuvent-elles servir ?

           De honte, je baissai la tête et je pensai : Je n'ai pas lutté pour obtenir ceci ; rien de tout cela n'a été acheté sur le marché ; ce ne sont pas des présents faits pour elle.

            Alors, durant toute la nuit, je jetai ces trésors dans la rue.

            Au matin, des voyageurs vinrent ; ils les ramassèrent et les emportèrent dans des pays lointains. »

    Rabindranath Tagore
    Le Jardinier d'amour - III

     

         Ces présents sont des pensées puisées dans le grand réservoir du Cœur. 

         Comme toutes les pensées, elles peuvent retourner d'où elles viennent.

         La seule offrande qui soit utile à l'Aimée, c'est Soi-même.

     

     

     

    « MystèreÉtonnante pleine lune du 25 décembre »

  • Commentaires

    1
    Mardi 22 Décembre 2015 à 11:27

    Magnifique texte, j'adore la fin qui est si vraie. Bonne journée Aloysia mais j'ajouterai qu'en cette période de fête les petits cadeaux autour du sapin entretiennent l'amitié !

      • Mardi 22 Décembre 2015 à 14:57

        Merci Danaé, en effet, c'est le moment de se faire des cadeaux et des bisous...

    2
    Mardi 22 Décembre 2015 à 22:05

    C'est toujours si beau, Tagore. J'approuve ton interprétation, et pourtant ce poème me trouble : je ne parviens pas à mépriser les merveilles arrachées au monde par l'effort du poète. C'est une forme de lutte, et d'avancée vers soi aussi, que cet effort, non ?

      • Mercredi 23 Décembre 2015 à 09:56

        En effet, Carole. je pense que mon interprétation correspond à un état d'esprit du moment, mais que ce n'est pas ce qu'a voulu dire Tagore. Je pense plutôt qu'il était dans l'esprit de considérer cette jeune femme comme l'âme humaine encore engluée dans le monde matériel, face à la profusion de bienfaits que le Divin met à sa disposition et qu'elle ne perçoit même pas.

    3
    Cécile
    Mercredi 23 Décembre 2015 à 04:22

    Et si le pêcheur avait œuvré tout "au large dans la mer", là où "elle est si profonde qu'on ne peut y jeter l'ancre et qu'il faudrait mettre l'une sur l'autre bien des tours d'église pour que la dernière émerge à la surface"?
    Si ardemment, qu'il aurait ramené quelque lianes des "arbres et des plantes les plus étranges dont les tiges et les feuilles sont si souples qu'elles ondulent au moindre mouvement de l'eau"? Et un bouquet de "corail", d' "ambre le plus transparent", et de "coquillages" à l' "effet féerique" car "dans chacun il y a des perles brillantes dont une seule serait un ornement splendide sur la couronne d'une reine"?
    J'hésitai un instant : bien-sûr...
    Car ces étranges merveilles, une bien-aimée les aurait reconnues. Une Fille de la Mer, ou une Fille de l'Air... 
    S' il avait plongé, souple et serpentin, dans l' "étrange lueur bleuâtre", comme "très haut dans l'azur avec le ciel au-dessus et en dessous de soi, plutôt qu'au fond de la mer", il aurait trouvé un "carré de jardin" bêché et planté d'une "corbeille de fleurs toute ronde comme le soleil" avec "des fleurs éclatantes comme lui".
    Des approches mettes d' "une enfant singulière, calme et réfléchie", il aurait découvert aussi qu'elles brillaient comme un sourire, que d'autres scintillaient comme des larmes et d'autres étaient rougissantes comme les joues d'une jeune épousée.
    S'il n'avait pu inventer le moyen de rester auprès de cette petite épouse, il l' aurait amenée  "à l'orient", vivre ensemble "la première lueur rose de l'aurore, le premier rayon du soleil". Il aurait de toute façon deviné qu'elle savait danser.
    Elle sait, et sait bien. Entre la mer et l'air, elle a appris sur terre, et sans crainte a assumé la douleur du "couteau effilé", avec la joie de perdre pour être trouvée.
    C'est la terre, claire, ocre, fine, argile, limon, dure, ou même l'humus épais qui a été son sol. Elle l'a plus aimée que toutes les autres dimensions ou natures. Elle aurait donc pu l'appréhender à nouveau.
    Et les pétales d'une fleur tombés, elle les aurait embrassés. 

    Ce n'est qu' une fantaisie de voyageurs à plusieurs voix, qui courent de l'Øresund jusqu'au Hooghly, que j'ai eu envie de poster ici, car je doute qu'on la retrouve, écrite ou complète, même en pays lointains.

     

      • Mercredi 23 Décembre 2015 à 16:35

        money   Quelle merveille tu nous offres là, Cécile !! Que de splendeurs ! Je vois des guillemets, as-tu puisé dans d'autres poèmes de Tagore, d'autres poètes, ou est-ce de toi ?... Oui, les "voyageurs" sont parfois plus appréciables que ceux à qui sont destinés les présents d'origine ; car on se trompe parfois tout simplement sur le véritable destinataire de l'offrande qui est faite et celui-ci surgit de l'inconnu.

    4
    Mercredi 23 Décembre 2015 à 10:14
    Daniel

    Le plus simple c'est d'offrir sans rien attendre en retour. De joyeuses fêtes à toi !

      • Mercredi 23 Décembre 2015 à 16:20

        Crois-tu que ce poète ait attendu autre chose, que de voir la joie de sa Bien-Aimée ? Que voulais-tu qu'il attende d'autre ?

    5
    Mercredi 23 Décembre 2015 à 16:20

    Juste pour un bon noël...

    Amitiés

    Jean

      • Mercredi 23 Décembre 2015 à 17:01

        Bon Noël à toi également, Jean.

    6
    Cécile
    Mercredi 23 Décembre 2015 à 17:25

    Oh non, ce n'est pas de moi ; cliquez sur "poster" wink2, qui apparaît en couleur différente, bleu maritime, vous comprendrez les guillemets.
    L'envie m'a prise de rapprocher des textes, comme je l'avais fait avec votre "Coupe" antérieurement.

     

     

     

      • Mercredi 23 Décembre 2015 à 17:32

        J'y suis allée, j'ai vu la Petite Sirène, un très joli timbre "poste", mais rien d'autre. J'ai aussi été sur Øresund et Hooghly... Alors il faut que j'approfondisse ! En effet j'ai bien vu qu'il s'agissait de rapprochement de textes et suis allée relire "la Corbeille de Fruits" de Tagore....

        Non, sous votre lien il n'y a que l'image. Il faut m'en donner un autre, je ne trouve pas... sarcastic

    7
    Mercredi 23 Décembre 2015 à 20:50

    j'ai bien souri en lisant ton commentaire. Et j'ai vu le petit bonhomme, plein de vitalité ... 

    merci pour R. Tagore ; cela me fait penser à un présent fait à une amie, il me semble que j'étais en 6ème ou 5ème et j'avais offert à une amie, la chose la plus précieuse que j'avais : une mue de serpent ... et elle me regarda d'un air bizarre ... et je repartis avec ma petite peau de serpent .. et aujourd'hui, je ne me souviens même plus du visage de l'amie. Bises et très bon Noël. Bises

      • Mercredi 23 Décembre 2015 à 22:07

        Je ne le vois pas vraiment "plein de vitalité", car il tourne le dos à ce Divin qui l'aspire, et ce qu'on voit devant c'est son bras ; il est attiré "à l'aveugle", il se laisse glisser en arrière, il coule pour ainsi dire...

        Oui, il est de ces expériences étranges qui en fait sont des enseignements. Était-ce bien pour elle, cette chose qui m'est si précieuse ? Alors l'amie semble te dire : "reprends ce qui t'appartient"... Mais pourquoi tenons-nous tant à donner ce à quoi nous tenons le plus ? Le visage oublié est le tien, dont tu ne peux te souvenir puisque tu ne te "vois" pas toi-même.

        Passe un très bon Noël Durgalola. 

    8
    Cécile
    Jeudi 24 Décembre 2015 à 02:42

    Point besoin d'aller plus loin, identifier le timbre, c'est déjà savoir yes tout bellement d'où vient ce qu'il y a dans l' enveloppe wink2, et peut-être entrer dans une "correspondance" choisie, goutée, attendue...
    Je ne voulais pas tant que cela faire de mystère, vraiment, la simplicité me fait défaut oops! Mais si le jeu que ce manque a amené vous a plu... alors disons ensemble : tant mieux!
    L' "Offrande lyrique" m'a été offert(e) par une de mes plus chères amies, aussi ai-je été sensible à ton invite à relire le grand poète bengali. Bien à toi-vous, Aloysia.

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    9
    Jeudi 24 Décembre 2015 à 09:47

    clown   Merci Cécile, pour ce jeu de surprise qui souligne encore la vaste béance de ma connaissance... Je ne connaissais pas ce texte magnifique dont voici la phrase que je retiens :

    " Donc il faudra que je meure et flotte comme écume sur la mer et n'entende jamais plus la musique des vagues et ne voie plus les fleurs ravissantes et le rouge soleil..." Une si belle promesse !

    10
    Jeudi 24 Décembre 2015 à 11:02

    On ne se lasse pas de lire et de re-découvrir Tagore, quelle puissance !!!

    De l'amour et de la joie à partager... de la gratitude pour tout ce qui nous est offert... Très belles fêtes du cœur Alyosa et des bises étoilées.   brigitte

      • Jeudi 24 Décembre 2015 à 14:39

        happy  Merci Brigitte pour tes bises étoilées. Qu'elles te soient rendues au centuple !



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