• La danse des morts (Claudel-Honegger)

     

     

    La danse des morts (Claudel-Honegger)

    La célèbre "danse macabre" de l'église de Kermaria an Isquit, dans les Côtes d'Armor

        A l'occasion de cette veille de Toussaint, j'aimerais vous faire partager mon admiration pour l'oeuvre qu'Arthur Honegger a conçue sur un texte de Paul Claudel : la Danse des Morts.

        Inspirée à Claudel par les gravures de Hans Holbein, cette "danse des morts" fait allusion aux danses macabres fréquemment représentées au Moyen Age et dont le but était de rappeler au croyant chrétien qu'il n'est que poussière, et que quelle que soit sa position sociale, il finira de façon identique dans la terre. On y voit à la suite un pape, un évêque, un moine, un empereur, un roi, un seigneur, un soldat, un bourgeois, tenant par la main des squelettes représentant la Mort, et dansant avec eux une farandole effrenée...


    Gravure d'Holbein représentant la Mort (XVIe s)
     
        Déjà traitée par Berlioz en 1830 dans sa Symphonie fantastique, (le dernier mouvement  "Songe d'une nuit de sabbat" - voir ici en cliquant sur "Wittches' Sabbath"- évoque le cliquetis des ossements qui dansent), puis par Saint-Saëns dans sa Danse Macabre (1840, voir ici),  et par bien d'autres musiciens, cette "Danse des Morts" s'affranchit de toute présence démoniaque pour revenir à la réalité biblique (un prophète a la vision de la résurrection des corps) en mettant l'accent sur la fragilité du destin humain face à la grandeur divine - thème mystique cher à Claudel.
        Elaborée par le célèbre dramaturge en 1938, elle est aussitôt mise en chantier par Honegger et sera montée à Bâle dès 1940 par le chef d'orchestre Paul Sacher, leur commanditaire.

                    

                 

    Honegger Claudel                                         

       
               
     
     
     
     
     
    Arthur Honegger, 1892-1955.             Paul Claudel, 1868-1955



        Dans ce premier extrait les ossements, réveillés par l'appel divin, commencent à danser ainsi que sur les fresques évoquées ci-dessus.

     
    Choeur parlé
         Souviens-toi homme que tu es esprit
          et la chair est plus que le vêtement
          et l'esprit est plus que la chair
          et l'oeil est plus que le visage
          et l'amour est plus que la mort.
    Choeur chanté
         Dansons, sur le pont de la tombe,
           on y danse y danse y danse,
           sur le pont du tombeau
           tout le monde y danse en rond !
           En rond dansons la carmagnole,
           vive le son, vive le son,
           dansons la carmagnole,
           vive le son du clairon !
    Récitant
           Le Pape !...
           L'Evêque !...
           Le Roi !...
           Le Chevalier !...
           Le Philosophe !...
           


    La danse des morts (Cloître des Saints Innocents)

    Une des dix-sept gravures sur bois de la Danse macabre
    du cloître des Saints Innocents
    à Paris


        Ce second extrait est le plus beau passage de l'oeuvre (début) : intitulé "Lamento", il décrit la détresse de l'homme déchu dans sa chair, face à la magnificence de Dieu. Honegger, de confession protestante évangélique, était aussi profondément croyant que son partenaire Claudel : en témoignent son "Roi David", sa "Cantate de Noël", son "Cantique de Pâques" et même sa 3e Symphonie dite "Liturgique", autant que l'oratorio "Jeanne d'Arc au Bûcher" qu'ils ont conçu ensemble. 

           "Souviens-toi de moi, Seigneur,
           parce que je suis poussière
           et que je retournerai en poussière !"


    La mort et le malheureux (Oudry)

    Gravure d'Oudry pour la fable de La Fontaine "La Mort et le Malheureux"
        

     

     
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  • Commentaires

    1
    Gabriel
    Dimanche 25 Novembre 2007 à 12:00
    Voici toutes les paroles du texte de ClaudelSouviens-toi de moi, Seigneur,parce que je suis poussièreet que je retournerai en poussière !Et vous, ayez pitié de moi,vous du moins qui vous disiez mes amisparce que la main du Seigneur m'a touché.Mes os se sont desséchés comme du boiset il ne me reste plus que les dentsautour de la bouche.Qui est l'homme pour que Tu le magnifieset pour que Vous lui attachiez votre cœur?Tu le visites au point du jouret l'épreuve commence pour lui aussitôt.Jusques à quand sera-ceque Tu oublies de m'épargneret que Tu ne me laisses pas le tempsque j'avale ma salive.Ma vie est comme le vent qui souffleet ma substance devant Toi est comme rien.L'homme né de la femme et qui vit peuTu vois de quelles misères, Seigneur,il est rempli !Il s'élève comme une fleur,et aussitôt il est brisé;il fuit comme l'ombre etjamais il ne demeure dans le même état.Et c'est sur un individu de cette espèce que tu juges digne de Toid'ouvrir les yeuxet de l'amener devant Toien jugement !Et il est vrai que j'ai péché.Qui peut faire purquelque chose né d'une semencequi ne l'est pas.Toi seul, Toi seulqui as fixé le nombre de ses moiset constitué devant luice terme qu'il ne saurait dépasser.Retirez-vous de lui, un peuqu'il ait repos,et que lui arrive enfincomme à un mercenaire, le jour,le jour désiré carje sais que mon Rédempteur vitet au dernier jourje me relèverai de la terreet de nouveau je serai enveloppéde ma peau et dans ma propre chair,je verrai ce Dieu qui est mon sauveur.
      • Dimanche 11 Octobre 2015 à 19:12

        Merci Gabriel, vraiment.



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