Ce poème, tiré du recueil "Le Passage" (édité dans "Renaître"), est composé à la façon des Chœurs du théâtre antique, sur une forme en trois parties : la strophe, l'antistrophe, et l'épode - les deux premières se répondant, la troisième concluant. Les "Choeurs", dans le théâtre grec, intervenaient pour ponctuer l'action tragique d'épisodes méditatifs, sous forme de poèmes assez longs (plus longs que celui-ci, les séquences se répétant plusieurs fois) ; ils étaient chantés et dansés sous forme d'évolutions lentes sur la scène, et commentaient la situation ou les sentiments des personnages. Lorsque j'ai écrit ce texte, j'étais plongée dans l'étude de la prosodie et de la musique des passages chantés du théâtre d'Euripide, et forcément, il en est resté quelque chose... Mais son contenu, par contre, n'a pas de rapport direct avec cette lecture. Il rappelle plutôt le Petrouchka de Stravinski, dont je vous livre un extrait ci-dessous.
Le jour de ton départ J'aurai presque oublié Avec quelques étoiles Avec quelques sanglots Le soleil déchiré sera le rideau rouge De mon théâtre ouvert
Je serai le Pierrot Désarticulé sur la scène Et par les bois lointains dont tu hantes les ombres Passera comme la mort Un grand oiseau d'automne
O chante avec la nuit Toi dont le souffle est semblable au reflux Des immenses marées
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Lorsque tu t'en iras Avec tes traînées d'astres Le cœur s'arrêtera de battre au firmament Les ondes répandues sècheront au soleil Les bois se figeront à la glace d'hiver
Et je serai ce cri Inarticulé sur la scène Et par les soirs lointains où tu m'étais promise Le désert sans limite S'étendra comme un voile
O chante pour ma nef Toi dont le souffle est le seul qui m'anime Au théâtre bouffon De la mer insensible
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La plus brillante étoile Aussitôt née s'éteint Le bateau fait naufrage Le pantin agonise Le théâtre s'écroule
Et il ne reste plus qu'une fumée bleuâtre Toi qui t'enfuis bien loin Vers le ciel des vivants
Et moi je suis Pierrot Qui ne respire plus Sur la scène inventée
Petrouchka, ballet d'Igor Stravinski extrait du second tableau