• Après la tempête


          Voici longtemps que je n'ai pas écrit.

           Je n'avais rien à écrire, car j'étais prise dans une sorte de tempête. Et quand on lutte contre la tempête, on ne sait plus parler. On sait juste dire : "Ouille ! Aïe ! Pitié !" !! Et puis attendre que ça se passe.

         Car ça se passe.

     

    Tableau de Thomas Jacques Somerscales_1842-1927

     

           On cherche à se raccrocher à des enseignements. Puis on se demande si on les suit correctement. Mais dans la tempête, vous ne pouvez rien suivre, rien faire d'autre que répondre à l'instant en criant : "Ouille ! Aïe !"

          J'avais le livre de Chögyam Trungpa dont je vous ai parlé ; mais dès que j'ai avancé dans sa lecture m'est venu un grand découragement : encore des enseignements ! Encore quelqu'un qui a des exercices à vous vendre, une voie à vous proposer ! Avec tout un fatras de concepts nouveaux et compliqués à souhait... Tout ce qu'il faut pour régaler le mental et vous emberlificoter encore plus.

          Je n'en ai retenu que ceci : "Chevaucher le vent". Chevaucher le vent pour moi, c'est s'asseoir gaillardement sur le mental et lui dire : " ça suffit ! Tu veux filer, tu veux ruer, tu veux hennir, vas-y !! Mais moi je m'en tape !!"

          Qu'est-ce que le mental ?... C'est tout ce qui arrive : ces émotions, ces activités multiples, ces pensées d'anxiété, de colère, de fatigue, d'angoisse, ces reproches que l'on s'adresse, ces paniques intenses et enfin cette dépression qui vous casse.

           Et puis j'ai retrouvé le texte de Betty que j'avais lu avant de partir. Le voici :

     

         «  La vie s’exprime chez l’être humain sous la forme d’un rêve, un rêve où se succède un carnaval d’impressions passagères. Elle éteint et allume les soleils, elle habille les arbres et les dépouille, elle colore les fleurs et les parfume, elle illumine le ciel noir d’étoiles de feu.
         Dans ce rêve éphémère, l’être humain s’est pris au sérieux ! Il rêve qu’il existe en tant qu’individu séparé et qu’il peut changer le mouvement de la vie.
           La vie, mon ami, ce n’est pas de tes affaires. Enlève-toi du chemin !

           Ce n’est pas une obligation d’être conscient de chaque instant. Ne pas l’être et s’identifier au rêve d’individualité ne changera rien au cours de la vie de cet organisme vibrant auquel on s’identifie. Le corps vit, que vous y soyez identifié ou non. Il danse somptueusement, s’adaptant parfaitement de l’enfance à la vieillesse, de la joie à la tristesse, de l’aube au crépuscule, de la naissance à la mort. Il fait partie intégrante du battement de cœur de la vie. L’opinion que vous en avez ne nuit pas et n’aide pas. Rêver d’individualité, c’est simplement déplacer son attention sur son histoire personnelle et la trouver intéressante.
     
         La quête existentielle, le mal-être intérieur, la recherche spirituelle appartiennent au personnage que tu crois être. La vie n’attend pas tes grandes prières ou tes intentions particulières pour se manifester. Le pouvoir d’intervenir que s’invente le personnage dans le monde du rêve est le reflet de son insécurité. Son rêve est donc bâti sur l’insécurité imaginaire.

        Voir comment fonctionne ce personnage c’est en tout premier lieu douter de ce qu’il appelle la vérité. Cette recherche de la « pure » vérité est un conditionnement illusoire qui est rarement remis en question. Remettre en doute honnêtement ce que le personnage interprète comme la vérité l’irritera peut-être, mais le forcera à rester en contact avec l’instant.

           Je vous invite à reconnaître simplement la condition dans laquelle on se trouve. Je vous propose l’image de l’œil du cyclone : un regard impersonnel au centre de la tempête de ce personnage imaginaire. Ce regard qui laisse la tempête être et qui ouvrira grandes les portes à la déconstruction du personnage et à la fraicheur de l’instant.

        Il est intéressant de voir comment le personnage est conditionné à espérer le changement, c’est-à-dire, à résister à ce qu’est l’instant. Il est en attente d’un lendemain meilleur. Sa vision est individuelle, elle est intéressée ; la vie, elle, est globalité et désintéressée.

         Le personnage veut changer le monde, changer les autres et se changer lui-même. Il est obsédé à l’idée d’obliger la vie à s’adapter à lui, à ses croyances, à ses convictions. Regardez vos réactions dans votre vie quotidienne, dans le monde des relations… ne sont-elles pas mécaniques, répétitives presque pathétiques ? Prenez conscience des émotions qui se réveillent, de la chaîne de pensées qu’elles déclenchent. Prenez conscience que les pensées redondantes accroissent l’intensité des vieilles émotions. En être conscient, c’est projeter la vie du personnage sur un écran géant et le regarder sans vouloir le changer.

          Voir clairement c’est aussi accueillir une impression accrue de souffrance et de sentiment d’impuissance. La souffrance ne deviendra jamais confortable, mais elle va passer sous le regard de l’honnêteté. La fuir ou la transformer ne l’éliminera pas.
           Vivez-la !! Prenez le risque de rester avec. C’est un bien petit investissement pour autant de liberté.  »
     
    -Betty
    (Voir ici et )
     

    Betty Quirion

     
     
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  • Commentaires

    1
    Mercredi 10 Août 2016 à 05:43

    Bonjour Aloysia,

    Cette conclusion fait réfléchir, comme tout le reste  sur ta, tes pages.

    On aimerait parfois se cacher la tête dans le sable et pourtant... il faut faire face. Nous sommes  icic bas pour vivre des expériences afin de grandir... Parfois, il faut vraiment se botter les fesses. Une tempête, ça impressionne

    Bises

      • Mercredi 10 Août 2016 à 09:09

        Il s'agit d'une tempête intérieure, on appelle ça aussi parfois une "douche écossaise" : quand les difficultés physiques dépassent la capacité de l'entendement. La seule façon de "grandir" est de les voir pour ces qu'elles sont : juste queqlques perturbations de passage...

        Belle journée, Martine.

    2
    Mercredi 10 Août 2016 à 09:12

    Bonjour Aloysia, 

    Prendre patience et attendre que la tempête se calme.

    Comme dit Betty, rien à chercher, tout est là !

    Bises

      • Mercredi 10 Août 2016 à 09:26

        Coucou Danaé ! j'aime aussi beaucoup ce que dit le Lama Gwendune Rinpoché  :

        Rien à faire
        Rien à forcer
        Rien à vouloir
        Et tout se fait tout seul.

        Cependant les choses se sont faites toutes seules par l'action de mon corps qui est épuisé et sous la tempête de mon crâne qui n'a pas cessé de paniquer. Alors il y a une chose à chercher : le point d'observation d'où il est possible de n'être pas le jouet de la tempête. Je ne l'ai pas encore trouvé... frown

    3
    Mercredi 10 Août 2016 à 15:39
    durgalola

    je reviendrai lire le texte de Betty ... il faut être calme pour lire, pas sauter de ligne en ligne comme un moucheron ou un papillon ..

    et je souris pour la tempête. Bien sûr que ce n'était pas comme d'habitude mais cette tempête ci valait bien le dérangement. Et vivre c'est aussi vivre "dérangée". De toute façon, cela se calme. 

    Dans l'enseignement, ce n'est pas l'enseignement qui est important, c'est juste le souffle.

    Bises 

      • Mercredi 10 Août 2016 à 16:05

        Toutes les tempêtes valent le dérangement. Sans tempête, pas de vie. La difficulté est de savoir se situer.

        Oui, tu as raison, l'important c'est le souffle ; quand mon mental panique parce que trop sollicité je me cabre mais ensuite dans la douceur je retrouve le souffle.

    4
    Jeudi 11 Août 2016 à 17:34
    Daniel

    Quel beau texte !Parfois j'ai envie de m'abandonner totalement, de laisser glisser sur moi tous les événements qui surgissent et de m'en remettre aux mains du divin. Et ça marche, cela me fait un bien fou. Je n'attends plus rien, j'accepte ce qui se présente. Hélas cette attitude est très temporaire !!!

      • Jeudi 11 Août 2016 à 22:24

        Oui, Daniel, il est si difficile de se maintenir dans cette position... Quand les choses coulent facilement on se laisse aller avec bonheur mais lorsque l'on se heurte à des buissons d'épines c'est autre chose ! Merci pour ce commentaire qui réchauffe mon coeur. Amitié.

    5
    Vendredi 12 Août 2016 à 09:51

    Être pris dans la tempête je connais ! Le positif est que, quand on émerge des tourbillons, on est pelé, vidé, mais encore plus fort.  Amitiés.

      • Vendredi 12 Août 2016 à 14:28

        Plus fort, du sentiment d'avoir vaincu ? Mais si c'est passé tout seul, rien n'a été vaincu, et rien en nous n'est changé !... Non, il me faut vraiment apprendre par coeur les dernières lignes de Betty : voir les mésaventures du personnage comme si c'était la projection d'un film et ne plus s'y intéresser ; ne plus prendre parti ni pour, ni contre ; ne plus le juger, ne plus essayer de l'améliorer... Et c'est bien là le plus difficile. 

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    6
    gazou
    Vendredi 12 Août 2016 à 18:01

    Je ne suis pas sûre d'avoir vraiment compris...

    accueillir ce qui vient...d'accord..pourquoi lutter quand ce qui vient ne peut être changé?

    mais vivre sans la conscience de ce qu'on vit...à quoi bon vivre ?

      • Vendredi 12 Août 2016 à 20:57

        Oui, c'est très difficile à cerner. Premièrement, il ne faut donc pas lutter : la lutte est une réaction instinctive et erronée. Deuxièmement, être conscient c'est d'abord se voir clairement comme un autre ; cette condition est l'indispensable préalable au fait de s'immerger ensuite dans l'instant, qui ne peut être pleinement vécu que lorsque l'ego est disparu. Tant que demeure l'ego (= le personnage que l'on vit avec toute son histoire) l'instant est travesti par les jugements, les souvenirs, tout le bagage mental, culturel et psychologique qu'il véhicule. Et dans ce cas, à quoi bon vivre, pour ne connaître que ce que Betty appelle du "recyclé" ?

    7
    Vendredi 12 Août 2016 à 19:50

    Les tempêtes sont là pour nous faire aimer les flots berceurs, chantants, ceux que l'on a oubliés en ne regardant plus la mer avec un oeil amoureux ....!

    Laissons-les nous parler, humblement, d'elles dépendent notre renaissance .....

    Vers toi , plein de bisous châle-heureux : sabine

      • Vendredi 12 Août 2016 à 20:59

        Oui, la bascule est permanente en ce monde, et de bas en hauts, de hauts en bas, de cimes en gouffres et de gouffres en cimes on apprend petit à petit à se "pauser"... smile Amitiés.

    8
    Mardi 16 Août 2016 à 10:10

    "Chevaucher le vent", l'expression est fort belle !

    Ce texte est vraiment intéressant, Baron Katie dit aussi "Quelle histoire te racontes-tu ?" " Qui es-tu sans cette histoire que tu te racontes ?"  Il nous faut souvent nous recentrer... Belle journée Alyosa.   brigitte

      • Mardi 16 Août 2016 à 16:05

        Merci, Brigitte. Il nous faut souvent prendre du recul par rapport à ce que nous vivons, oui.



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